

Pierre Bourges - Ancien Maire de Redon
La ville comme un poème
Redon 31.12.1988
C'était à l'ouverture du chantier d'aménagement du centre- ville, en 1989, au moment le plus agité de la suppression du passage à niveau entre la Sous-Préfecture et la Mairie...
Ce texte m'est venu, au point charnière, où la volonté collective dont nous avions la charge, tremblait, prise de vertige, devant le « trou », (comme disaient nos opposants) creusé sous la voie ferrée pour réunir les deux parties du Champ de foire, communément appelé Place de la République, coupé par la construction, à la moitié du XIX° siècle, de la ligne Paris- Quimper.
Comment avons nous osé entreprendre, pour le bien commun, ce chantier tant attendu de nos concitoyens et devenu depuis lors « amphithéâtre urbain » comme lieu d'expression de notre convivialité festive ?
C'est encore une question que je me pose aujourd'hui et dont la réponse est peut-être dans ce texte écrit sous la dictée d'une âme collective qui reste attentive au devenir humain d'un Pays dont elle est le centre de gravité.
P. B
1
La ville
comme un poème
qui se veut la vie même
Et qui s'éveille au jour
comme un enfant s'éveille
Et dont le premier cri
donne couleur et sens
au regard qui le suit
Et qui glisse et s'échappe
en riant au poème.
2
La Ville comme un poème
qui se veut la vie même
Et qui chante au grand vent de ses cloches
Et qui chuinte et qui claque
à l'aurore
Et qui grince et qui griche
et renvoie
les appels d'écoliers
en échos au poème.
3
La ville
comme un poème
qui se veut la vie même
Et qui marche et s'active
Va et vient vire et volte
trame et tisse le drap
qui l'habille
Et que le jour qui passe
use un peu et retouche
comme on fait d'un poème.
4
La Ville
comme un poème
qui se veut la vie même
Où le parfait filou
salue le saint bedeau
Où les amoureux fous
s'embrassent sur les bancs
du monument aux morts
Où les drapeaux claquent
aux balcons officiels
Où les trains passent
et repassent sans fin
comme un refrain
de long poème.
5
La ville
comme un poème
qui se veut la vie même
Et qu'il nous faut défaire
et refaire sans cesse
Pour que chacun y trouve
ce qu'il y vient chercher
Pour que chacun lui donne
tout ce qu'il peut donner
Et qu'à chacun il soit donné
de respirer à plein poumon
la Liberté
comme l'air frais
d'un vieux poème.
6
La ville
comme un poème
qui se veut la vie même
Et qui n'en finit pas
de démêler les nœuds
de ses vieilles rancunes
et de ses lourdes peines
Et qui parfois s'en moque
Et qui se rit quand il faut rire
aux jours de fête
comme au poème.
7
La ville
comme un poème
qui se veut la vie même
Et s'interpelle et s'invective
Et se déchire
Lève les mains
Baisse les bras
Et qui s'apaise au soir venu
dans la paix retrouvée du poème.
8
La ville
Comme un poème qui se veut la vie même
Et qui veille
à la nuit
sur le noir lit de l'eau
Et qui berce les rêves
et les mots
du poème.
A noter: ce poème a d'abord été écrit par Monsieur Bourges pour quelques amis puis a été offert à Redon 2032